L’AUTRE LIGNE

Climax Paris 2017, Maison de l’architecture Ile-de-France. Nominé.

 

L’Autre Ligne est une fiction. Ian Kame Taverner dérive dans les rues de Paris qui a atteint son climax. Alors qu’il suit la ligne 2 du métromatique aérien entre les stations Jaurès et Stalingrad, il y découvre suspendues à ses poutres métalliques d’étranges structures molles en formation.

Minuit venait de passer, mais l’air ambiant était encore lourd et chaud. Défilant sur ses rétines électro-sensibles, les algorithmes prédicateurs n’arrêtaient pas de soumettre son cerveau artificiel à de nouvelles données ; mais aucune ne voulait changer le cours des choses. Cela faisait maintenant plus d’une semaine que Ian n’était pas sorti de chez lui — même depuis l’intérieur cartographié de son sommeil hypodermique. L’atmosphère rafraichie de son appartement n° XB15 était devenue un véritable dopant anxiogène. Mais cette nuit-là, il en avait envie, il irait déambuler dans les rues noires à la dérive.

Son errance le conduisit vers la ligne. Cette ligne de métal qui supportait toujours le métromatique. Il aimait cette frontière invisible qu’il suffisait de suivre pour imaginer ce qui avait été autrefois une des limites de la capitale. Elle n’était plus maintenant qu’une étendue informe aux lumières indéfinies.

Paris avait pourtant évolué, on avait tenté de le transformer à des fins résilientes. La ville faisait de son mieux pour répondre aux contraintes d’un futur qui s’éternisait dans un présent à perpétuité dans lequel zonaient des corps schizophrènes et dégénérés par l’horloge atomique.

Sa vision était troublée. Ian ne savait pas si c’était parce que le taux d’humidité indiqué sur ses capteurs était élevé, mais il se sentait pris dans un bouillonnement d’images étranges. Il suivait toujours la ligne dont les dessous par endroits se déformaient comme si une maladie apparaissait — la ville ne supportait plus son climax bio-technologique. La vie avait pourtant su résister, mais l’offre éco-industrieuse n’avait pas répondu à la demande de manière équitable.

Les prothèses qui devaient maintenir un état urbain stable mutaient. Les cerveaux botoxés des survivants avaient donné naissance à un alien urbain métastasé. Des bubons luminescents et suants la vermine technique apparaissaient là où la ville pouvait encore les accueillir.

The Other Line is a fiction. Ian Kame Taverner drifts through the streets of Paris, which has reached its climax. As he follows Line 2 of the aerial Metromatic between the Jaurès and Stalingrad stations, he discovers strange soft structures suspended from its metal beams.

It was past midnight, but the surrounding air was still hot and heavy. Scrolling through his electro-sensitive retinas, the predictive algorithms never stopped subjecting his artificial brain to new data—but none of them wanted to change the course of things. It had now been over a week since Ian didn’t leave home—even since the mapped interior of his hypodermic sleep. The cooled atmosphere of his apartment had become a real anxiogen drug. This night, because he wanted to, he would stroll along the dark streets adrift.

His wandering led him toward the line, this metal line that had always supported the Metromatic. He liked this invisible border, he only needed to follow to imagine what had once been one of the boundaries of the capital. It was now nothing more than a shapeless expanse of undefined lights.

Nevertheless, Paris had evolved; and attempts had been made to transform it for resilient purposes. The city was doing its best to meet the constraints of a future that dragged on in a perpetual present, in which schizophrenic bodies wandered aimlessly, degenerated by the atomic clock.

His vision was clouded. Ian didn’t know if it was because the humidity readings on his sensors were high, but he felt caught in a web of strange images. He was still following the line, whose undersides were twisting in places as if a disease was emerging—the city was no longer supporting its biotechnological climax. Life had been able to resist, but the eco-industrial supply had not equitably met the demand.

The prostheses that had to preserve a stable urban state were mutating. The botoxed brains of the survivors had given birth to a metastasized urban alien. Luminescent buboes sweating the technical vermin appeared there, where the city could still host them.

2018-09-03T14:36:09+02:00mars, 2018|Catégories : FIL, PROJETS|Mots-clés : , , , , , |

DO ANDROIDS DREAM OF ELECTRIC GARDEN ?

Amélioration de l’auto-suffisance connectée de nos villes

D-503 avec N. Ryan

 

Ville et attraction : auto-suffisance collective

   Depuis 5.500 ans que la ville existe et pour la première fois de l’humanité, 2007 est le moment qui voit 50 % de la population mondiale vivre dans les villes. La ville attire toujours plus l’humanité vers elle. Pourquoi cette attraction ? Est-ce cette auto-suffisance connectée qui pousse les humains au mouvement, à la migration vers les villes ?
La ville est une entité humaine et urbanisée autonome, elle se suffit à elle-même dans bien des domaines ; elle est un centre administratif, politique, religieux, intellectuel, commercial, industriel, etc. Habiter la ville, c’est avoir l’assurance de trouver une réponse à ses besoins, à ses désirs, à ses espérances. Pourtant la ville c’est aussi les bidonvilles, la précarité, le chômage et l’insécurité. Tout n’y est pas qu’attraction. Mais vu le nombre croissant de citadins, il faut croire que la ville a plus d’attraits que d’aspects négatifs. C’est peut-être dans cette poly-qualitativité de la ville, dans cette liberté de pouvoir idéalement se la représenter et de pouvoir faire des choix que l’attraction opère. La ville donne du possible ; elle nous donne à croire au changement, à une évolution permanente — à notre chance.
Rien n’est figé dans la ville ; le mouvement donne forme à son existence. La ville est mouvement. Elle est l’incarnation de la vie tumultueuse des hommes. Elle est le lieu où tout s’opère, tout s’échange et où tout se transforme. Elle est une entité de vie. Elle est Échange — elle est Connectivité par nature. Elle possède en elle de manière symbolique tout ce qui doit assurer son autonomie, sa subsistance et sa survie. Elle est ce liant qui doit satisfaire aux besoins fondamentaux de tous — mais c’est aussi au-delà de ce besoin premier, le lieu où explosent les désirs et les fantasmes de l’imagination collective.

Ville et contraction : auto-suffisance spatiale et énergétique

   Paris 2057. Les ressources en énergie fossiles de la planète se sont considérablement réduites. Le pétrole est devenu une denrée rare et donc très chère. S’impose alors la nécessité d’une économie drastique des dépenses énergétiques.
La voiture permettait autrefois des déplacements qui n’optimisaient pas les distances entre les différents besoins de la vie humaine. Des déplacements consommateurs de distance et donc d’énergie entre son chez soi, son travail, son ravitaillement et ses loisirs, etc. ne sont plus possibles.
En 2057, Paris optimise ses distances. La ville se contracte par nécessité entropique – elle se re-localise. Elle ne peut plus grandir et se propager sur le territoire de manière désordonnée et energivore.
Paris se redonne des limites à son expansion. Elle doit se suffir d’un espace qu’elle s’impose à ne pas dépasser. Une limite vitale qui protège la ville d’elle-même afin d’en assurer un fonctionnement interne optimal. Une enceinte virtuelle qui s’imperméabilise pour mieux contrôler les échanges entre son intérieur et son extérieur. Une porosité maîtrisée qui redéfinit ses points d’entrée et de sortie (input & outpout). (suite…)

2017-04-26T21:21:58+02:00décembre, 2010|Catégories : FIL, PROJETS, TEXTES|Mots-clés : , , , , , , , , |